Articles de blog de JF VIEL
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Ce texte, extrait des livres de couleur du Châtelet de Paris (Archives nationales, Y 6/6, f°102 r°), est une sentence rendue par le Parlement de Paris le 8 août 1523, ordonnant la première exécution d’un protestant en France.
Le supplicié se nommait Jean Vallière. Natif d’Acqueville, près de Falaise, il était devenu moine augustin au couvent de Livry-en-Aulnois, près de Paris. Progressivement gagné aux idées du cénacle de Meaux puis à celles de Luther, il eut l’outrecuidance d’affirmer publiquement, ainsi que le rapporte le "Journal d’un bourgeois de Paris", que « Nostre Seigneur Jesus Christ avoit esté de Joseph et de Nostre Dame conceu comme nous autres humains ». Il n'en fallut pas davantage pour que sa condamnation à mort soit prononcée, dans des conditions particulièrement atroces, pour servir d'exemple...
Transcription :
« Extraict des registres de Parlement.
« Veues par la court les charges et informacions faictes par le juge et garde des
prevostz et soubz baillye de Poissy ou son lieutenant alencontre de Jehan VALLIERE, soy
disant hermite, prisonnier en la conciergerie du Pallais pour raison des excecrables
et detestables blaphemes par luy dictz et proferez de Nostre Saulveur et Redempteur
Jhesus Crist et de la Glorieuse Vierge Marie sa mere, les interrogatoires et confessions
dudict Valliere faictes par devant aucun conseiller d'icelle court à ce faire par elle
commis, les recollemens de tesmoings et confrontacions faictes audict prisonnier.
Et luy oy et interrogé en ladicte court sur lesdictz cas, lequel c'est advoué
clerc et comme tel a requis estre rendu à son ordinaire. Et tout consideré,
dit a esté que ledict VALLIERE ne sera rendu comme clerc et ne joyra de privilleige
de clericature. Et au surplus la court pour raison desdictz cas a condempné
et condempne ledict VALLIERE à estre mené en ung tumbereau où l'en porte les
immundices de la ville jusques devant l'eglise Nostre Dame de Paris, et illec
requerir mercy et pardon à Dieu et à la Vierge Marie desdictz blaphemes. Et ce
faict estre d'illec mené au marché aux pourceaulx et illec avoir la langue
couppée et après estre bruslé tout vif, son habit et son corps mis en
cendre. Et a ordonné et ordonne ladicte court que le procès faict contre ledict
VALLIERE sera bruslé. Et declaire ses biens confisquez. Faict et excecuté
le huitiesme jour d'aoust l'an mil cinq cens vingt troys. Ainsi signé
MALON. Collation est faicte. »
Ainsi signé : LORMIER, avec paraphe.
Bibliographie :
- Journal d’un bourgeois de Paris (1515-1536), Paris, 1910, pp. 397-398.
- John Viénot, Histoire de la Réforme française, Paris, 1926, vol. 1, p. 90.
- David El Kenz, Les bûchers du Roi : la culture protestante des martyrs (1523-1572), Paris, 1997, p. 10.
[ Modifié: samedi 21 novembre 2020, 16:39 ]